FARGO, de Noah Hawley

Car cette série d’anthologie, portée par un casting 5 étoiles, a su creuser son propre sillon, singulier, à partir des particularités du film de Joel et Ethan Coen, par ailleurs producteurs de la série. La boucle est bouclée. Pour l’humour noir et les paysages glacés, sublimes et incongrus. Pour les personnages absurdes, fêlés, grotesques. Un must.

THIS IS A TRUE STORY. Le pari n’était pas simple, mais la chaîne FX (Sons of Anarchy, The Shield, Justifed) et Noah Hawley (Legion) en charge de l’adaptation, ont brillamment relevé le défi pour aboutir à une des séries phares de la décennie, aussi culte que son illustre parent cinématographique. Une réinvention qui a trouvé le parfait équilibre entre un récit inédit et l’exploitation de l’atmosphère et des codes de l’univers des frères Coen. Les paysages glacés du Minnesota. La galerie de personnages médiocres, tordus, retors, hilarants. Un ton qui oscille entre le lugubre, le grotesque, le pathétique et le mystérieux. Ainsi tout le monde s’y retrouve. Les cinéphiles feront les liens entre Lester Nygaard et Jerry Lundegaard (William H. Macy dans le film), Molly Solverson et Marge Gunderson (Frances McDormand), et voir Lorne Malvo comme une incarnation du duo Carl Showalter (Steve Buscemi) et Gaear Grimsrud (Peter Stormare). Ceux qui n’ont pas vu le film apprécieront à leur juste valeur le ton décalé, l’humour noir, l’atmosphère joyeusement excessive typique des Coen. Sans oublier une mise en scène inventive et passionnante exploitant à 100% les paysages enneigés et désertiques du Minnesota.

LA BONNE IDÉE DE L’ANTHOLOGIE. Autrement appelée « collection ». Qu’est-ce à dire ? Une série née d’un créateur unique. Un titre inchangé pour des saisons qui offrent à chaque fois une histoire différente. Cette idée de génie permet de renouveler les intrigues, les personnages, sans risque d’usure. Avec des acteurs de renom plus facilement prêts à s’engager pour une seule saison (6 à 10 épisodes, par ex pour Fargo) plutôt que sur des séries au long cours. Dernier atout, on peut commencer la série par n’importe quelle saison puisque chacune est indépendante et bouclée.

UN LABORATOIRE HUMAIN. Tout est possible au royaume de la médiocrité. C’est ce que tend à prouver cette première saison où le génial Martin Freeman incarne un parfait loser, a priori inoffensif et pathétique, qui va se transformer en monstre attachant. La bascule s’opère avec l’arrivée à Bemidji de Lorne (génial Billy Bob), seul personnage hors du commun de la série, tueur à gage sans peur ni émotions, qui va l’inciter à bafouer toutes les normes sociétales américaines. Ainsi, cette série s’avère fascinante dans sa capacité à pousser des gens tout à fait ordinaires à faire des choses extraordinaires. Au milieu de ce paysage de doux dingues imbéciles, à côté de Lester et Lorne, se tient Molly, la flic lambda, persévérante et logique à défaut d’être d’une intelligence supérieure.  Assistée dans sa rude tâche par son alter ego masculin, Gus Grimly, tout aussi touchant qu’elle. Probablement les seuls personnages empathiques de la série.