L. A. CONFIDENTIAL, de Curtis Hanson

Film
Bien
Très bien
Un Must
Néo-noir

Le pitch

C’est inracontable, évidemment. Mais qui se soucie de comprendre vraiment un film noir ? Pour faire simple, ça parle de stars, d’embrouilles et de corruption. Ça sent la poudre dans la cité des anges au début des années 50. Où trois inspecteurs, aux méthodes plus ou moins musclées, enquêtent sur la mort sordide d’une prostituée. Une adaptation remarquable du roman dense et touffu de James Ellroy. Un film noir qui saisit intensément une atmosphère. Un instant du temps propice au crime plutôt qu’une banale histoire de meurtre. Un univers où se croisent flics, mafieux, reporters fouineurs, prostituées transformées en copies conformes de stars de cinéma. Le monde du cauchemar éveillé. Un très grand film d’acteurs, qui fait resurgir le spectre les plus belles heures d’Hollywood. L’un des meilleurs films des années 90. Pas forcément novateur, je vous l’accorde, mais jubilatoire.

Pourquoi je vous le conseille ?

Parce que même James Ellroy en convient, ce polar fifties magnifiquement écrit et dirigé, est tout à fait remarquable : « Hanson est arrivé à capturer l’essence de mon livre. » Car ce film sulfureux s’attaque à la corruption policière et aux aspects les plus miteux du vieux Hollywood, en s’appuyant sur un casting en or massif et une mise en scène efficace et sans esbroufe. Parce qu’il rend un brillant hommage aux films noirs et demeure toujours aussi fascinant, 25 ans après. Car si on fait le compte, il n’y en aura pas eu beaucoup d’autres des films de cette trempe, de cette classe, de cette assise.

BLOODY CHRISTMAS. L. A. Confidential mérite encore et toujours d’être inclus parmi les films de Noël alternatifs. À partir d’un sordide fait divers du Réveillon, le spectateur est absolument ravi d’être ballotté durant plus de deux heures, d’embrouilles en embrouilles, de fausses pistes en fausses pistes. Dans un L.A. des années 50 où Audrey Hepburn est à l’affiche de Vacances Romaines, Lana Turner des Ensorcelés de Minelli. Tandis que les mafieux noient L. A. sous la poudre blanche. Même si au final le roman est beaucoup plus sombre que le film, où Hanson a fait le choix de se concentrer sur les scènes intérieures, sur le parfum de la ville ans les années 50 et sur la romance plutôt que sur une reconstitution réaliste. C’est ce qui frappe dans L.A. Confidential. La façon qu’à Hanson de se mettre en retrait, comme un artisan sincère, avec son réalisme étrange qu’on n’avait pas vu depuis Chinatown. Un travail sur les décors qui évoquent des endroits qui n’existent plus et génèrent instantanément – comme les classiques hollywoodiens – de la mythologie. James Ellroy en convient, même s’il n’en fait pas une critique « Mon livre est plus froid, plus sombre, et mes héros bien plus révulsants. » Des personnages, justement, qui existent. S’incarnent. Grâce à un casting parfait.

MAIS QUE FAIT LA POLICE ? Eh bien, ça dépend. Jack Vincennes, aka Hollywood Jack aka Poubelle (Kevin Spacey), se prend pour Robert Mitchum et Dean Martin réunis, joue les conseillers techniques sur les séries en vogue, trafique un peu de chantage auprès des célébrités pour mettre du beurre dans ses épinards et avoir sa photo dans le journal. Bud White (Russell Crowe), montagne de muscles et boule de nerfs, cogneur au grand cœur qui tape sur ceux qui tapent les femmes, est d’accord pour détourner la loi, au nom du bien. Ed Exley (Guy Pearce), le plus jeune, le plus ambitieux, le plus diplômé, serait, lui, plutôt prêt à se désolidariser de ses collègues peu scrupuleux. Le malheureux Dudley Smith (James Cromwell) a la lourde responsabilité de contrôler ces êtres incontrôlables, alors que la drogue qui inonde la ville suscite bien des convoitises tous azimuts et que des journalistes crapoteux (excellent Danny de Vito) n’ont de cesse de traquer ce vice chez les vedettes d’Hollywood.

SIMILI HOLLYWOOD. « Hanson a parfaitement saisi le fonctionnement du livre, qui tourne autour du subterfuge. Des gens cachent de secrets et cherchent à arnaquer l’autre en permanence. » Un Hollywood en forme de trompe-l’œil, un miroir aux illusions, où les putes sont déguisées en stars et les reporters en criminels. Car rien n’est ce qu’il parait être dans ce Hollywood pourri jusqu’à la moëlle. Où les policiers usent de techniques de voyous. Où des call-girls sont métamorphosées en sosies de stars à la mode : une fausse Rita Hayworth, vite assassinée, une simili Veronica Lake (come-back spectaculaire de Kim en vamp hollywoodienne). Comment démêler le vrai du faux ? Même la vraie Lana Turner qui passait par là se fait traiter de traînée, un gangster au bras. Los Angeles n’est pas seulement une ville où les gens se bercent d’illusions, elle est la capitale du faux.

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La fiche

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