GRIFFES, de Malika Ferdjoukh

Livre
Bien
Très bien
Un Must
Thriller victorien

Le pitch

Une diligence traverse la lande venteuse du Northumberland, au nord de l’Angleterre. Les voyageurs échangent quelques mots, mais les politesses sont troublées par une annonce spectaculaire. Une femme raconte avoir quitté Londres parce qu’elle a été témoin d’un meurtre… dans un rêve ! Avec un sens éprouvé de l’intrigue et des personnages hautement attachants, Malika Ferdjoukh enchaîne rebondissements, scènes horrifiques et comiques dans ce savoureux cozy mystery pour la jeunesse. Une totale réussite, piquante et délicieusement fantastique. Dès 11 ans.

Pourquoi je vous le conseille ?

Car c’est drôle, frais, et cocasse. Parce que Malika Ferdjoukh s’amuse et nous amuse en jouant avec les ­codes du récit policier de détection à la Sherlock Holmes dans cet hommage facétieux aux écrivains anglo-saxons qui l’ont accompagnée depuis l’enfance : Conan Doyle, Rumer Godden, Stevenson, Mildred Davis, John Dickson Carr, Ellery Queen, Jane Austen, Dickens… Car l’autrice ponctue l’intrigue joliment tortueuse d’une fine description de la société victorienne. Pour l’humour pince-sans-rire, Sooo British. Pour le doute distillé à petites doses bien senties, avec une inquiétante et subtile présence de fantastique.

DES PERSONNAGES DRÔLEMENT FACÉTIEUX. Griffes regorge d’échanges savoureux entre des personnages très malins, sensibles, délicieux et dotés d’une bonne dose d’humour. À commencer par la jeune Flannery, notre héroïne ultra dégourdie, d’une hardiesse folle. Une fine mouche, Miss-je-sais-tout d’une réjouissante modernité qui a bien l’intention de marquer son époque. À ses côtés, un duo d’enquêteurs aux caractères opposés comme de bien entendu, est chargé de lever le voile sur le mystérieux tueur de Morgan’s Moore. Le superintendant Tanybwlch de Scotland Yard dont « on s’amusait des ­frasques, on pardonnait au talent, on ­excusait le génie » est dépêché sur place avec son adjoint Pitchum Daybright, tout juste diplômé de la Royal School of Studies in Criminology. Un petit jeune émotif qui vire au rouge tomate à la moindre émotion et qui a bien du mal à imaginer qu’une fille puisse s’avérer bien plus maligne que lui. Sans omettre tous les autres habitants du patelin, tous parfaitement distribués. Le lecteur tourbillonne ainsi au milieu des différents points de vue, ­craignant un nouveau coup de griffe, sans pour autant omettre un sens de l’humour qui finit de nous rendre le récit hautement délectable.

« Le nez de Pitchum Daybright plongea droit dans la joue de Flannery Cheviot et sembla s’y plaire assez pour y demeurer. Ainsi que ses deux bras autour d’elle. En vérité, la chute les avait complètement sonnés. Flannery reprit la parole la première.
– Nous avons l’air d’idiots, non ?
– Je m’en voudrais d’être vexant en vous répondant. »

UNE PINCÉE DE FANTASTIQUE. Comment expliquer l’inexplicable ? Le spiritisme si prisé au XIXème siècle, tient lieu de fil narratif délicieusement horrifique dans cette aventure policière bien ficelée.  Où les références littéraires sont légion, à commencer par le mystérieux crime en chambre close qui va nous occuper au début du récit. Une enquête étrange de bout en bout, assumée par le service de Scotland Yard tout à fait marginal qui est d’ailleurs en charge de l’enquête. Le superintendant Tanybwlch n’est-il pas le créateur du département SDDI and INC (le Service Des Dossiers Insolites et des Intrigues Non-Conventionnelles) ?

UNE SOCIÉTÉ VICTORIENNE GENTIMENT ÉPINGLÉE. Morgan’s Moore. Ses villageois, ses notables, son unique auberge et ses crimes épouvantables. La romancière transforme le village en un petit théâtre où le lecteur s’attable dans une auberge, déambule de boutiques en demeures isolées, et fourre son nez dans des histoires de famille jusque-là glissées fébrilement sous le tapis. Une campagne anglaise refermée sur ses secret, ses mensonges, encore prisonnière d’une société corsetée et inégalitaire qui a du mal à se moderniser.

Partager :
FacebookTwitterEmail

La fiche

Auteur(s) :

Titre original :

Date de publication originale :

Éditeur :

Où se procurer

Si vous avez aimé, découvrez du même auteur

Malika Ferdjoukh est une romancière française qui écrit des romans, ainsi que des scénarios pour la télévision, le cinéma, et la BD.

Les joues roses (1993), son premier roman paru à l’École des loisirs, a reçu le Grand prix du Ministère de la Jeunesse et des Sports, le Prix du Roman Jeunesse Européen, le Prix du roman d’humour 1993.

Sombres citrouilles (1999) reçoit le Prix Sorcières 2000 dans la catégorie adolescents. Il apparaît dans l’internationale « Honoured List » de l’IBBY en 2002.

Minuit Cinq et les quatre tomes des Quatre Sœurs (2003-2004) ont été sélectionnés par le Ministère de l’Éducation nationale pour les collégiens de 5e. Ils ont été adaptés en bande dessinée par Cati Baur (2011-2018).

Publié sous le pseudonyme d’Élisabeth Seiler, Le Fantôme de Forest Lodge (Syros 1990) est réédité à l’Ecole des loisirs sous le titre La Fiancée du fantôme (1999).

À découvrir ailleurs, dans la même ambiance

Rebecca, roman de Daphné du Maurier paru en 1938, (et son adaptation très réussie par Hitchcock en 1947, avec Joan Fontaine et Laurence Olivier). Le roman, inspiré par les œuvres de Charlotte Brontë et peut-être aussi par celles de Jane Austen, est considéré au xxie siècle comme un classique de la littérature anglaise. C’est à Monte-Carlo que le richissime et séduisant veuf Maxim de Winter croise le chemin d’une jeune domestique qu’il ne tarde pas à séduire. Bientôt, ils se marient et retournent habiter dans le manoir de Manderley, demeure familiale de Winter, au sud de l’Angleterre. Très rapidement, dans cet endroit lugubre et froid, la nouvelle Mme de Winter se confronte aux domestiques qui ne semblent guère l’apprécier. Surtout, c’est Mme Danvers, la gouvernante, qui est la plus vindicative. Car depuis toujours, elle servait Rebecca, l’ex-femme de M. de Winter décédée un an plus tôt dans un accident. Son souvenir semble hanter le château.

Jane Eyre de Charlotte Brontë (1847). Jane Eyre est pauvre, orpheline, pas très jolie. Pourtant, grâce à sa seule force de caractère, et sans faillir à ses principes, elle parviendra à faire sa place dans la société rigide de l’Angleterre victorienne et à trouver l’amour… Une héroïne qui surmonte les épreuves sans perdre foi en son avenir, une intrigue où se succèdent mystères et coups de théâtre, une passion amoureuse qui défie tous les obstacles : le plaisir de lire Jane Eyre est toujours aussi vif. Comme elle, on veut croire que rien n’est écrit d’avance et que la vie réserve des bonheurs imprévus.

Les Hauts de Hurlevent, l’unique roman d’Emily Brontë, publié pour la première fois en 1847 sous le pseudonyme d’Ellis Bell.Une histoire de vengeance intemporelle. « Il est l’orgueil en personne. Il est l’excès. Il est la foudre. Il est élégant et sauvage. Il est tendre et brutal comme un tranchant de scie. Il s’appelle Heathcliff. De Heathcliff, Emily Brontë a le caractère entier, l’insolence prompte et le refus têtu de se plier aux contraintes sociales dès lors qu’elles ne s’appuient que sur des faux-semblants. De lui, le goût de la lande que, depuis l’enfance, elle parcourt en tous sens, une lande qui meurt l’hiver sous le poids de la neige et les hurlements du vent pour renaître au printemps dans les bruyères roses et les crocus dorés dont elle fait des bouquets. Mais Emily ne partage en rien la noirceur effroyable de son héros, pas plus que sa classe sociale dite inférieure, une classe contre laquelle Heathcliff, l’enfant trouvé, l’enfant sauvage, l’enfant sans nom et sans lignage, se révoltera et se vengera avec un acharnement qui confinera à la démence. » Lydie Salvayre

Le château du Dragon (Dragonwyck, 1h43, 1946) de Joseph L. Mankiewicz. Avec Gene Tierney, Vivienne Osborne, Jessica Tandy, Vincent Price. En 1844, la fille d’un fermier, Miranda Wells, est invitée par une relation Nicholas Van Ryn à venir faire un séjour dans sa maison pour tenir compagnie à sa fille. A son arrivée, la jeune fille trouve ses hôtes très étranges.

Enola Holmes, film de Harry Bradbeer (2021, 2h03). Avec Millie Bobby Brown, Henry Cavill, Sam Claflin. Enola, la jeune sœur de Sherlock Holmes, met ses talents de détective à l’épreuve pour tenter de retrouver sa mère disparue et déjouer une dangereuse conspiration. Sur Netflix.