MYCÉLIUM, de Fabrice Jambois

Livre
Bien
Très bien
Un Must
Fantastique contemporain

Le pitch

Paris, septembre 2018, Porte de la Chapelle. Des migrants meurent brutalement, mystérieusement foudroyés par un mal étrange. Les soupçons se portent sur les Vicaires, un groupuscule d’ultra-droite dirigé par un gourou charismatique. La brigade criminelle est saisie, ainsi que le parquet anti-terroriste. C’est le début d’une traque intense, dans les limbes d’un Paris occulte. Un roman très noir, à la lisière entre fantasme et réalité. Un conte fantastique contemporain.

Pourquoi je vous le conseille ?

Pour l’atmosphère angoissante d’un Paris interlope, étrangement familier, remarquablement décrit et incarné. Car le roman trouve un juste équilibre entre réalisme et occultisme. Pour le style, au cordeau, vivant, riche. Car c’est un roman très documenté, ancré dans la réalité contemporaine, qui aurait hérité des thèses et recherches sur les phénomènes paranormaux qui faisaient florès dans la première moitié du siècle dernier. Pour l’action, l’adrénaline, la chasse.  Un roman aussi érudit qu’efficace pour une lecture aussi addictive qu’éprouvante.

APOCALYPSE NOW. Septembre 2018, les attentats de 2015 sont dans tous les esprits, la peur est partout, la parano guide les réflexes. L’enquête se déroule dans un Paris interlope, poisseux, sombre, et néanmoins parfaitement identifiable. La porte de la Chapelle surtout, tristement familière avec ses campements sauvages de migrants régulièrement évacués et régulièrement re-squattés. Constituant une sorte de jungle humaine et urbaine à laquelle les Parisiens ont fini par accoutumer.  Misère. Le réalisme du tableau se poursuit. Lignes et stations de métro, arrondissements, rues, monuments défilent et invoquent des images connues, amplifiant le malaise, décuplant une impression de vérité quand il s’agit pour l’auteur de nous parler du pire. D’autant que viennent s’ajouter des virus tristement contemporains : agissements de groupuscules d’extrême-droite, solitude à l’ère des réseaux sociaux, déviance de l’industrie pharmaceutique, addictions en tous genres. Fabrice Jambois donne à voir une vision du monde très noire, faisant écho au fracas quotidien des actualités quitte à nous faire douter de son aspect fictionnel.

UNE TRADITION FRANÇAISE. Pourtant, nous voyageons bien au-delà du réel avec Mycélium. Où des phénomènes inexpliqués nous font basculer, de temps à autres, dans le fantastique. Hypnose, somnambulisme, paranormalité, surréalisme, occultisme, chamanisme … des gens très sérieux se sont penchés sur ces questions pour en dégager des idéologies et courants de pensées qui ont tenu une place non négligeable en France au siècle dernier. Les Français ont largement suivi le mouvement comme en témoigne le scandaleux succès du Matin des Magiciens (Jacques Bergier et Louis Pauwels) paru en pleine période moderniste des Trente Glorieuses. Un ouvrage d’introduction au « réalisme fantastique », soit à l’idée qu’il n’y a pas de coupure entre la réalité et ce qui est habituellement rejeté dans le domaine du « paranormal » au sens large. Et quand on imagine que l’improbable Institut Métapsychique International décrit dans le roman n’a rien d’une invention… Et pourtant, malgré ce mélange de médiumnité, de lucidité magnétique, et de transmission de pensée. Malgré des phénomènes inexpliqués, l’écriture ne perd jamais de vue le réel et la lucidité. Cette ligne de crète tenue d’un bout à l’autre du roman en fait sa force. On touche du doigt l’extraordinaire, les pieds bien ancrés dans un quotidien qui nous rappelle que le pire est toujours possible. Notre choix en tant que lecteur est soit de favoriser la réalité ou de lui préférer l’illusion.

UN STYLE MAGNIFIQUE, VISUEL. EFFICACE.  Ce premier roman donne des sueurs froides tant certains passages provoquent à la lecture un malaise presque physique. Dans des chapitres courts et nerveux, sans titres mais précisant qui quand où à la manière d’un scénario, l’auteur nous distille une violence sourde, disséminée, maintenant le lecteur en alerte jusqu’à l’oppression, dans un récit balloté entre violence, surréalisme et action pure. Le style de Fabrice Jambois y est pour beaucoup. Subtil, incisif, ne manquant pas d’humour dans certains passages et d’émotion dans d’autres. Une lecture difficile à lâcher, faisant naviguer le lecteur entre réalisme technique et horreur scientifique. Un auteur à suivre, assurément !

« Taille moyenne, cheveux bruns courts, Ravard était un homme de quarante ans, c’est-à-dire un homme qui a posé le pied sur une pente glissante et qui commence à glisser. Il portait un pantalon en denim brut japonais et une veste de cuir noir. Mâchoire carrée, allure énergique. Il pouvait encore séduire, mais il n’avait pas la tête à ça. »

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