LE BIKINI DE DIAMANTS, de Charles Williams

Livre
Bien
Très bien
Un Must
Polar burlesque

Le pitch

Le Sud profond des Etats-Unis dans les années 50. Billy passe l’été chez son oncle Sagamore avec son père, Pop. Entre les visites du shérif et le lac où il apprend à nager, le jeune garçon ne s’ennuie pas. Mais lorsque Doc Severance et Melle Harrington, supposément atteinte d’anémie et obligée de rester au vert, viennent se réfugier chez son oncle, les vacances deviennent alors vraiment intéressantes. Tout le sel de ce grand classique du polar noir, rural et humoristique, tient dans le choix et le ton du narrateur. Un gamin de sept ans dont la naïveté affichée fait merveille. Un classique parmi les classiques.

Pourquoi je vous le conseille ?

Car on retrouve dans ce livre tout l’univers de Charles Williams (1909-1975) : des pauvres ploucs blancs du Sud, des gangsters, des flics bornés et des arnaqueurs en tous genres. Parce que ce régal inénarrable, initialement traduit par Marcel Duhamel pour la Série noire (sous le titre Fantasia chez les ploucs) a été retraduit en 2017 par Laura Derajinski*, avec un titre plus respectueux de l’original (The Diamond Bikini) et qui invite à sa (re)découverte. Merci Monsieur Guérif et les éditions Gallmeister.

LE DÉCALAGE COMIQUE. On pense inévitablement à Huckleberry Finn à l’écoute du jeune narrateur, Billy, décrivant avec une délicieuse candeur sa vie et les événements qui viennent bouleverser son quotidien. François Guérif l’écrit dans la postface du livre. « Le tour de force du livre vient du décalage entre ce qui est raconté par le narrateur de sept ans et ce que le lecteur comprend et transpose », Et il ajoute : « Mais le récit est piégé ». Le petit garçon est-il aussi naïf et innocent qu’il en a l’air ?

UNE TRUCULENTE GALERIE DE PERSONNAGES. Il y a les 2 frères Noonan. Pop, le père de Billy, qui fait dans l’escroquerie aux courses de chevaux, contraint de prendre la tangente. Et l’oncle Sagamore, dont la spécialité est plutôt la distillerie clandestine. Le gamin raconte d’ailleurs les visites du shérif qui rêve de le coincer. Mais le meilleur moment des vacances sera l’irruption d’un homme accompagné d’une belle jeune femme, Melle Harrington aka Choo-Choo Caroline, une strip-teaseuse souvent vêtue de son seul bikini de diamants, poursuivie par des gangsters. L’arrivée de cet équipage va perturber l’équilibre en place et donner aux frères Noonan l’occasion d’éprouver leurs stupéfiantes qualités d’arnaqueurs. Délire et second degré à tous les étages. Avec une part belle laissée au rôle de femme, autre particularité de l’auteur.

LE SUD PROFOND. Le bikini de diamants a pour cadre une petite ville (qu’on imagine au Texas) infestée de moustiques et de serpents. Williams nous parle de ces « pauvres blancs » du Sud, du contraste entre la ville et la campagne, et en particulier de la petitesse et la fourberie de certains habitants des petites villes de province. Contemporain de Williams, John Steinbeck (1902-1968) décrivait la misère du Sud en faisant le choix d’un réalisme social et engagé.  Autre auteur sudiste longtemps et souvent censuré, Erskine Caldwell (1903-1987), choquait les ligues de vertu dans sa description violente et crue d’habitants du Sud, abandonnés à leur misère crasse, aux comportements à la limite de l’humanité. Williams fait quant à lui le choix du second degré, de la loufoquerie et de la noire moquerie. Tout en offrant le plus beau des rôles à un femme, lumineuse dans son bikini de diamants.

*traductrice notamment de David Vann (également publié chez Gallmeister), lauréat du prix Médicis étranger en 2010 pour Sukkwan Island.

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Charles Williams (1909-1975) est un des maîtres du roman noir d’origine texane. Il s’engage dans la marine marchande, puis sert dans l’armée jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il s’installe ensuite à Los Angeles après la guerre. Il publie son premier roman en 1951 et rencontre immédiatement le succès avec Hill Girl. Au total, il écrit vingt-deux romans, est adapté à treize reprises sur grand écran et collabore à l’écriture de plusieurs scénarios. Bien-aimé du public français, il reçoit le Grand Prix de Littérature policière en 1956 pour Peaux de Bananes.

 

Si l’œuvre de Williams a peu intéressé les cinéastes américains de son vivant, à l’inverse il a beaucoup séduit les réalisateurs français.

Le roman a été adapté au cinéma en 1971 : Fantasia chez les ploucs, de Gérard Pirès. Avec Lino Ventura et Mireille Darc dans le rôle de Choo-Choo.

Parmi les adaptations ciné de Charles Williams, on citera encore :

  • Peaux de bananes (Marcel Ophuls, 1963)
  • L’arme à gauche (1965) de Claude Sautet
  • Vivement dimanche ! (1983) de François Truffaut
  • Hot Spot de Dennis Hopper