BILLY SUMMERS, de Stephen King

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Un Must
Mémoires d'un tueur à gages

Le pitch

Un sniper vétéran de la guerre en Irak reconverti en tueur à gages, écrivain à ses heures, accepte le job de trop. Ça sent le roussi… D’une trame policière classique, Stephen King nous offre un magnifique roman noir sur l’Amérique contemporaine, sans avoir recours aux éléments fantastiques et flippants qui ont construit sa célébrité. Un témoignage d’amour au métier d’écrivain qui peut « changer le monde ». Passionnant et très habilement mené.  Une bien belle réussite.

Pourquoi je vous le conseille ?

Parce que Stephen King, quoiqu’on en pense, fan ou pas fan, est un conteur exceptionnel. Pour Billy Summers, un magnifique personnage romanesque, tueur à gages et apprenti écrivain. Énigmatique et attachant. Pour découvrir une certaine Amérique, celle des classes sociales moyennes et modestes qui triment en périphérie des grandes métropoles et dans les interstices abandonnés. Car c’est un récit gigogne qui propose un roman dans le roman, tous deux hautement recommandables, pour former un tout absolument étonnant, original, voire tendre aux entournures.

UN ROMAN NOIR SUR L’AMÉRIQUE CONTEMPORAINE. Avec plus de 60 romans et quelque 200 nouvelles à son actif, Stephen King (couronné en 2003 par le National Book Award pour sa contribution aux lettres américaines) aka le Roi du Fantastique, nous amène loin de ses sentiers les plus battus. Tout en continuant de creuser ses sujets de prédilection.  Et si son dernier roman Billy Summers nous réserve quelques cadavres dans le placard, il nous offre surtout des personnages fermement ancrés dans un contexte culturel et politique contemporain : l’Amérique de Trump (sa bête noire, qui s’en prend quelques-uns) et pré-Covid. Avec ses horreurs tout à fait humaines : la pauvreté, le crime, les prédateurs de tous gabarits – violeurs, mafieux… Nul besoin à l’auteur de Misery, Dolores Claiborne, Carrie… d’en rajouter dans le fantastique et les effets spéciaux pour égrener certains maux de ce siècle avec un roman dans le roman finement orchestré où des scènes d’action bien efficaces alternent avec d’autres, plus introspectives, dressant une radiographie de son Amérique, en proie à bien des démons.

UNE PASSION DE TOUJOURS : L’ÉCRITURE. « Saviez-vous qu’il était possible de s’asseoir devant un écran ou une feuille de papier et de changer le monde ? Ça ne dure pas, le monde finit toujours par revenir, mais en attendant, c’est génial. Il n’y a rien de mieux. Car tout se passe comme vous le voulez (…). » Comme dans La Part des ténèbres, ou encore Misery, il s’agit aussi, et avant tout pour l’auteur de parler d’écriture et de littérature.  Alice, la jeune paumée que Billy Summers prend sous son aile, déclame ainsi sa flamme à cette vraie passion. Seul espace où l’on est libre de créer des mondes, selon son propre désir. D’où Billy Summers, son personnage de tueur à gage lettré, grand lecteur de Zola, Thomas Hardy (entre autres), obligé de se faire passer pour un romancier en attendant d’exécuter sa victime à l’occasion de son dernier contrat, en profite pour prendre la plume et coucher ses Mémoires noir sur blanc.  Des « extraits » de ses souvenirs, intimes, traumatiques ou militaires, partagés tout au long du récit, donnent une profondeur de champ presque fantastique à cet habile roman noir.

UN CONDENSÉ DE SON OEUVRE.  Ce grand polar sur l’Amérique d’aujourd’hui est l’occasion pour l’auteur, désormais septuagénaire, de se renouveler sans pour autant abandonner sa puissance d’évocation, ses thèmes de prédilection, ses clins d’œil malicieux à certains de ses autres romans (une myriade de références comme la ville de Boulder dans Shining ou Lee Harvey Oswald, l’assassin de Kennedy, dans 22/11/63), ses tendresses et ses hantises. Un roman qui gagne en célérité, dans un style vivifié dopé aux phrases courtes, aux changements de rythmes, pour mener crescendo un suspense aussi retors qu’efficace. Comme s’il était besoin de prouver qu’il peut se passer du surnaturel pour nous tenir en haleine. À la manière d’un Donald Westlake ou d’un Ross Macdonald, cet excellent roman gigogne nous montre un autre visage de l’écrivain américain, l’envers du maître de l’horreur. Avec cette histoire de tueur à gages acceptant un ultime contrat, Stephen King livre un vrai thriller sous forme de jeu de piste, un portrait de l’Amérique oubliée, une déclaration d’amour à la littérature. Et pas mal de nostalgie.  Un pas de côté vers le polar et le roman noir que King s’autorise de temps à autre. Pour notre immense plaisir.

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La fiche

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Avec plus de 60 romans et quelque 200 nouvelles à son actif, je fais ci-dessous un biblio extra sélective…

  • Carrie, Gallimard, 1976 (Carrie, 1974)
  • Salem, Alta, 1977 (Salem’s Lot, 1975)
  • Shining, l’enfant lumière, Alta, 1979 (The Shining, 1977)
  • Dead Zone, Jean-Claude Lattès, 1983 – Publié initialement sous le titre L’Accident – (The Dead Zone, 1979)
  • Cujo, Albin Michel, 1982 (Cujo, 1981)
  • Christine, Albin Michel, 1984 (Christine, 1983)
  • Simetierre, Albin Michel, 1985 (Pet Sematary, 1983)
  • Ça, Albin Michel, 1988 (It, 1986), Paru en deux tomes
  • Misery, Albin Michel, 1989 (Misery, 1987)
  • Les Tommyknockers, Albin Michel, 1989 (The Tommyknockers, 1987)
  • La Part des ténèbres, Albin Michel, 1990 (The Dark Half, 1989)
  • Dolores Claiborne, Albin Michel, 1993 (Dolores Claiborne, 1992)
  • Insomnie, Albin Michel, 1995 (Insomnia, 1994)
  • La Ligne verte, Librio, 1996 (The Green Mile, 1996), Publié en six volumes puis en intégrale par les éditions 84 en 1997
  • Dreamcatcher, Albin Michel, 2002 (Dreamcatcher, 2001)
  • Dôme, Albin Michel, 2011 (Under the Dome2009)
  • 22/11/63, Albin Michel, 2013 (11/22/63, 2011)
  • Joyland, Albin Michel, 2014 (Joyland, 2013)
  • Sleeping Beauties, Albin Michel, 2018 (Sleeping Beauties, 2017), Coécrit avec Owen King.
  • L’Outsider, Albin Michel, 2019 (The Outsider, 2018)
  • L’Institut, Albin Michel, 2020 (The Institute, 2019)
  • Après, Albin Michel, 2021 (Later, 2021)

Idem pour les adaptations ciné de ses romans. On retiendra :

  • Carrie au bal du diable, de Brian de Palma (Carrie, 1977, 1h38). Avec Sissy Spacek, Piper Laurie, Amy Irving. Tourmentée par une mère névrosée et tyrannique, la vie n’est pas rose pour Carrie. D’autant plus qu’elle est la tête de turc des filles du collège. Elle ne fait que subir et ne peut rendre les coups, jusqu’à ce qu’elle ne se découvre un étrange pouvoir surnaturel. Interdit aux moins de 12 ans.
  •  Shining, de Stanley Kubrick (The Shining, 1980, 2h35) avec Jack Nicholson, Shelley Duvall, Dany Lloyd. Écrivain, Jack Torrance est engagé comme gardien, pendant tout l’hiver, d’un grand hôtel isolé du Colorado – l’Overlook – où il espère surmonter enfin sa panne d’inspiration. Il s’y installe avec sa femme Wendy et son fils Danny, doté d’un don de médium. Interdit aux moins de 12 ans.
  • Christine, de John Carpenter (Christine, 1984, 1h51). Avec Keith Gordon, John Stockwell, Alexandra Paul. La première fois qu’Arnie vit Christine, il tomba en extase devant cette beauté aux formes éblouissantes. C’était dit, ils allaient lier leurs destins pour le meilleur et pour le pire. Mais Christine, la belle Plymouth, modèle 57, n’aime pas trop les rivales. Gare à celles qui voudront approcher Arnie.
  • The Dead Zone, de David Cronenberg (The Dead Zone, 1984, 1h45). Avec Christopher Walken, Herbert Lom, Brooke Adams. Johnny Smith, jeune professeur dans une petite ville de province, est victime d’un accident de la route, peu de temps après avoir raccompagné sa fiancée, Sarah. Il ne revient à lui qu’au bout de cinq années de coma. Sarah est à présent mariée. Il s’aperçoit que passé, présent et futur se confondent dans son esprit. C’est ainsi qu’il réussit à sauver d’un incendie l’enfant de son infirmière et qu’il révèle à son médecin que sa mère, qu’il croyait morte en déportation, est en fait toujours vivante.
  •  Misery, de Rob Reiner (Misery, 1991, 1h47). Avec James CaanKathy BatesLauren Bacall. Paul Sheldon, romancier et créateur du personnage de Misery dont il a écrit la saga est satisfait. Il vient enfin de faire mourir son héroïne et peut passer à autre chose. Il quitte l’hôtel de montagne où il a l’habitude d’écrire et prend la route de New York. Pris dans un violent blizzard, sa voiture dérape dans la neige et tombe dans un ravin. Paul Sheldon doit son salut à Annie Wilkes, infirmière retraitée qui vit dans un chalet isolé. Annie est justement une supportrice inconditionnelle de la belle Misery. Interdit aux moins de 12 ans.
  • Dolores Claiborne, de Taylor Hackford (Dolores Claiborne, 1995, 2h12). Avec Kathy Bates, Jennifer Jason Leigh, Christopher Plummer.  Intendante d’une femme riche et méprisante, Dolores Claiborne nous raconte sa vie à ses côtés et ce qu’il s’est réellement passé sur l’île où elles habitaient.
  •  La Ligne Verte, de Frank Darabont (The Green Mile, 2000, 3h09). Avec Tom Hanks, Michael Clarke Duncan, David Morse. Paul Edgecomb, pensionnaire centenaire d’une maison de retraite, est hanté par ses souvenirs. Gardien-chef du pénitencier de Cold Mountain en 1935, il était chargé de veiller au bon déroulement des exécutions capitales en s’efforçant d’adoucir les derniers moments des condamnés. Parmi eux se trouvait un colosse du nom de John Coffey, accusé du viol et du meurtre de deux fillettes. Intrigué par cet homme candide et timide aux dons magiques, Edgecomb va tisser avec lui des liens très forts. Interdit aux moins de 12 ans.
  • Stand By Me, de Rob Reiner (Stand by Me, 1987, 1h25). Par Stephen King et Raynold Gideon. Avec River Phoenix, Richard Dreyfuss, Corey Feldman. Un événement peu ordinaire va marquer la vie du jeune Gordie Lachance. Au cours de l’été 1959, un adolescent a disparu mystérieusement dans l’Oregon. Gordie et ses inséparables copains, Chris, Teddy et Vern savent qu’il est mort. Son corps git au fond des bois. C’est le frère de Vern qui l’a découvert. Les enfants décident de s’attribuer le scoop et partent pour la grande forêt de Castle Rock. Cette aventure va rester pour Gordie et ses trois amis la plus étrange et la plus exaltante de leur vie. À partir de 10 ans.