LA PART DES ANGES, de Ken Loach

Film
Bien
Très bien
Un Must
Comédie d’arnaque

Le pitch

À Glasgow, un jeune délinquant, tout juste père, condamné à une peine d’intérêt général, se découvre un talent insoupçonné de goûteur de whisky dont il va savoir tirer profit, avec le soutien d’une belle équipe de bras cassés. Une tragédie en puissance qui se dénoue en comédie sociale : voilà de quoi mettre le cœur en joie. Revigorant. Dès 10 ans.

Pourquoi je vous le conseille ?

Car si ce film ne saurait se comparer aux grands drames naturalistes et politisés dont Ken Loach s’est fait le remarquable hérault tout au long de sa carrière, il n’en demeure pas moins une comédie sociale truculente où les acteurs, pour la plupart non professionnels, délivrent une partition sans fautes et bourrée de malice. Parce que rire et émotions vont de pair grâce au talent de ce grand réalisateur humaniste qui s’essaie ici à la fable. Un film profondément sympathique qui jamais ne se prend au sérieux.

SOUS LES PAVÉS LA GALÈRE. MAIS PAS QUE. La Part des Anges tient certes de la fable cocasse et savoureuse. Mais y affleure également une dure réalité emprunte de gravité, comme toujours chez Loach. Le propos y est moins dramatiquement social que dans Family Life, Raining Stones ou Ladybird. Moins politisé que dans The Navigators, Moi Daniel Blake ou Sorry we missed You. Car ici le ton de Ken Loach est plus optimiste, loin de ses récits poignants de descente aux enfers qui ont fait sa renommée. Pour les amateurs du maître, vous êtes ainsi prévenus. La trame sociale est bien présente avec la mise en situation précaire d’une bande de jeunes délinquants, étiquetés comme losers sans espoir de retour. Coincés dans une banlieue gangrenée par le chômage et les petites combines minables. Mais l’intention est clairement de se tenir à un registre drôle et picaresque, pour notre plus grand plaisir.

LA FINE ÉQUIPE. Ce film étonnamment optimiste pour un Loach, s’attache au sauvetage d’une bande de pied niquelés sur lesquels on n’aurait pas misé un kopeck. Une dreamteam composée d’une klepto, d’un rustre et d’un demeuré. Sans oublier au cœur de la bande Robbie, le délinquant ex-toxico au visage balafré et jogging xxl. Leurs condamnations (à de travaux d’intérêt général) seront-elles un passeport pour une nouvelle vie ? En tout cas elles leur permettront de se rencontrer entre cas sociaux totalement barrés, tous unis pour la mise en œuvre d’une arnaque tout à fait savoureuse à défaut d’être réaliste, car là n’est pas le propos. Une rédemption qui prend des allures d’embrouille dans le monde fascinant des amateurs de whisky. On aurait tort de bouder son plaisir à suivre les aventures de nos antihéros en kilt, les deux pieds ancrés dans la tourbe.  Des branquignoles qui sont interprétés par des non-professionnels pour la plupart, avec une énergie et une générosité qui contribuent énormément à la réussite du film.

LE WHISKY, MONSIEUR FERNAND. Tout un pan méconnu (de moi tout du moins) du patrimoine culturel britannique nous est dévoilé par des scènes parmi les plus truculentes du film.  J’ai nommé la découverte du whisky, une passion écossaise révélée jusque dans les coulisses de sa fabrication (ses fûts, ses cuves, ses alambics et l’explication de la fameuse part des anges, évaporation miraculeuse d’une partie du précieux alcool), et des mises aux enchères de ses crus millésimés qui déclenchent toutes les convoitises. Une vénération nationale pour un breuvage dont la spéculation peut s’avérer source d’arnaques juteuses et l’occasion pour Loach de nous offrir de bonnes barres de fous rires. Une mise en scène qui gagne en amplitude également alors qu’on se déplace de la banlieue étriquée de Glasgow aux panoramas majestueux et sauvages des Highlands. Un voyage au grand air qui élargira l’horizons de nos savoureux personnages dont la fraîcheur et la spontanéité apportent le charme unique à cette jolie fable.

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La fiche

Titre français :

Titre original :

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Couleur / noir et blanc :

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Ken Loach est un merveilleux réalisateur de chroniques sociales amères et dramatiques. Peu de comédies il faut bien le dire. Je recommanderais donc quelques-uns de ces histoires âpres mais magnifiques.

  • Kes (1970). Avec David Bradley, Colin Welland, Freddie Fletcher.  Une enfance très difficile. À partir de 10 ans.
  • Hidden Agenda (1990). Prix special du jury à Cannes. Enquête et espionnage en Irlande du Nord. Avec Frances McDormand, Brad Dourif, Mai Zetterling.
  • Riff Raff (1991). Une histoire d’amour sur fond de lutte ouvrière. Avec Robert Carlysle, Jimmy Coleman, Emer McCourt.
  • Raining Stones (1993).  À travers l’histoire de la famille Williams et de son chef Bob, au chômage depuis de long mois, une évocation de la misère ordinaire des habitants de la périphérie de Manchester. Avec Bruce Jones, Julie Brown, Ricky Tomlinson, Gemma Phoenix. Poignant.
  • Le Vent se lève (2006). Irlande, 1920. Le combat de paysans contre les troupes anglaises. Avec Cillian Murphy, Padraic Delaney, Liam Cunningham.
  • Moi, Daniel Blake (2016). Palme d’Or au Festival de Cannes 2016. Avec Dave Johns, Hayley Squires, Dylan McKiernan. Drame social qui dénonce les aberrations du système administratif britannique.
  • Sorry we missed you (2018). Avec Kris Hitchen, Debbie Honeywood, Rhys Stone. Une vision amère et désenchantée des dérives du capitalisme et de l’ubérisation des sociétés.
  • Land and Freedom (1995). 1936. Un jeune Anglais décide de rejoindre les rangs de l’armée républicaine espagnole. César du meilleur film étranger en 1996. Avec Ian Hart, Rosana Pastor, Frédéric Pierrot.
  • My name is Joe (1998). Une chronique sociale d’un grand humanisme. Avec Peter Mullan (prix d’interprétation à Cannes), Louise Goodall, David McKay.
  • Sweet Sixteen (2002). Une adolescence difficile. Avec Martin Compston, Michelle Coulter, Annmarie Fulton. Interdit -12 ans.

À découvrir ailleurs, dans la même ambiance

Le Pigeon (I solliti ignoti, 1959) de Mario Monicelli. Avec Claudia Cardinale, Vittorio Gassman, Renato Salvatori. Une farce italienne qui se mêle à la tragédie et où le pigeon n’est pas forcément celui qu’on croit.

Le Cerveau (1969). Film de Gérard Oury, classique parmi les classiques du film d’action tous publics. Avec Bébel, Bourvil, David Niven, Eli Wallach.